mardi 31 janvier 2012

Ah ! Daho, mon Daho ! Hakim Laâlam

Le maître-boulanger, la farine magique
et les baguettes au garde-à-vous !

Par Hakim Laâlam
Email : laalamh@yahoo.fr
C’est officiel ! Les législatives seront supervisées par des juges.
Et c’est censé me rassurer ?
Ah ! Daho, mon Daho ! Dommage que Noël soit passé, parce que je te verrais bien en habit rouge, une hotte sur le dos et des rennes à tes pieds. Eh oui ! Une nouvelle fournée de cadeaux, tu viens d’annoncer, ô Daho, mon Daho ! Si j’ai bien saisi ton propos, demain mercredi 1er février, une liste de «nouveaux» partis politiques autorisés à tenir congrès devrait être rendue publique par tes soins. A défaut de Papa Noël, j’en sentirais presque l’odeur de la «coucha», du four à pain. Ça sent fort la pâte, la levure, la farine lancée par pincées lourdes sur le froment, et la palette longue et maintes fois léchée par le feu, prête une fois encore, une fois de plus à enfourner les baguettes. Et à les retirer. Au signal, bien sûr. Ah ! Daho, mon Daho ! Ce signal ! Ce fameux signal qui annonce la sortie des pelletées. Chez mon vieux boulanger, c’est une sonnerie qui nous délivre, nous ses clients qui attendons patiemment derrière le comptoir. Dès son grésillement toussoteux et chevrotant, nous savons qu’enfin le pain est là. A chacun sa boulangerie, n’est-ce pas mon Daho ? Dans la tienne, point de sonnerie claire et franche. Les fournées se succèdent au rythme des communiqués et des annonces. Dix. Dix d’un premier coup. Puis demain, mercredi peut-être dix autres, voire quinze. Qu’importe le nombre, l’essentiel étant que le four fonctionnât et que les clients attendent debout, l’œil guettant l’arrière-salle et les nuages de farine magique. Ah ! Daho, mon Daho ! Ton œuvre, celle du châtelain que tu sers est une véritable réhabilitation de l’artisanat. Tu n’aurais pas été ministre de l’intérieur du système, je t’aurais vu en charge de celui de l’artisanat et de la boulange élevée au rang d’orfèvrerie. Et que les aigris cessent de s’interroger sur la cessation d’activité longue, plus de vingt ans, de ton échoppe, et sa reprise miraculeuse aujourd’hui. Les aigris sont comme ça, Daho, mon Daho. Au lieu de manger goulûment le pain, ils essaient de le disséquer, le découpent en quignons, en triturent la mie, dans l’espoir peut-être de tomber sur l’élément intrus, l’anomalie. Alors qu’au fond, toi, tu n’es que le boulanger. Il bosse si on lui livre la farine. Il farniente si ses sacs sont vides. Dieu comme tu bosses en ce moment, Daho, mon Daho. Dix partis l’autre jour. Demain, dix autres, peut-être. Voire plus. Les paniers sont grands, la farine subventionnée, et les gens qui mangent de ce pain-là tellement debout, les babines en alerte, derrière le comptoir. Finalement, maître Daho, maître boulange-artisan, comme tu as raison ! Le mois de mai n’a jamais été propice pour arrêter de manger du pain. Et pour ceux que l’odeur de la levure écœure quand même, l’horloge indique encore un peu de temps, juste un peu de temps, pour fumer du thé et rester éveillé à ce cauchemar qui continue.

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